S’il y a bien une actrice qui échappe à l’exhaustivité, c’est certainement Sandra Huller. Voilà pourquoi notre titre dément, dans sa deuxième partie, notre première affirmation. Vous ne saurez pas tout sur cette actrice géniale. Notre objectif n’est pas de réécrire sa page Wikipédia et il est évident qu’elle va encore nous surprendre dans ses futurs projets. Cependant, ce mois-ci, la chaîne franco-allemande ARTE propose une rétrospective Sandra Huller, avec quatre films qui nous permettent de découvrir le travail de l’actrice à différentes étapes de sa carrière.

UNE ACTRICE AU PARCOURS RESOLUMENT CREATIF ET BRILLANT

Désormais reconnue star internationale suite au succès du film Anatomie d’une chute, elle avait déjà une grande carrière européenne et s’était distinguée par ses choix et la qualité de son jeu d’actrice, dès son premier film Requiem.

Sandra Huller dans Anatomie d'une chute, photo pour la presse, ADC_PHOTOGRAMME_38 ©LESFILMSPELLEAS_LESFILMSDEPIERRE
Sandra Huller dans Anatomie d’une chute, photo pour la presse, ADC_PHOTOGRAMME_38 ©LESFILMSPELLEAS_LESFILMSDEPIERRE

En France, on l’avait déjà remarquée dans un précédent film de Justine Triet Sybil, où elle campait, avec un charisme évident, une réalisatrice, en burn-out et en couple, avec un acteur torturé (interprété par le regretté Gaspard Ulliel).

A l’issue de la Cérémonie des Césars 2024, où elle a reçu le César de la Meilleure Actrice, cette sélection de la chaîne Arte extraite de sa filmographie, permet de découvrir un parcours résolument créatif, avec des prises de risques incroyables mais toujours pertinentes. L’actrice sort de sa zone de confort en permanence et illustre à merveille cet adage : un bon acteur doit savoir tout jouer.

Quand on voit les films où elle interprète un rôle, on constate qu’elle se coule dans ses personnages et son interprétation naturelle fait oublier le travail important qu’elle doit sans doute effectuer (elle a même appris le français pour jouer dans le film Anatomie d’une chute). Quand on la voit, on y croit, que se soit quand elle incarne une diva, une jeune fille potentiellement envoûtée ou une cadre supérieure dépressive sans le savoir. Sa palette de jeu, du drame à la comédie, est riche et nous avons regardé la sélection d’Arte avec un plaisir toujours renouvelé.

La chaîne lui offre une belle reconnaissance jusqu’au 2 septembre 2024 avec ces films que nous vous recommandons.

SANDRA HULLER : LA RETROSPECTIVE SUR ARTE

Centre commercial romantique, démons et psychiatrie, père intrusif plein de poils et poète à la gâchette facile : voici quelques éléments et personnages marquants de ces quatre films diffusés sur Arte.

Nous vous faisons notre compte-rendu dans l’ordre dans lequel nous avons visionné ceux-ci :

TONI ERDMANN Disponible jusqu’au 30 avril 2024.

De quoi ça parle ?

Ines (Sandra Huller) , cadre dynamique trentenaire, est consultante pour une société allemande. Elle doit relever un défi majeur pour l’avenir de son entreprise et elle est complétement à cran, expatriée en Roumanie, à Bucarest, avec des responsabilité écrasantes. C’est justement lors de cette période stressante, que son père, un homme espiègle qui adore se déguiser, choisit de lui rendre visite, pour une durée indéterminée. Il enchaîne bien sûr boudes sur bourdes. Il est envahissant au possible, et les nerfs de la jeune femme seront mis à rude épreuve. Mais ne serait-ce pas aussi l’occasion d’entamer un dialogue père-fille salutaire ?

Sandra Huller nous a bluffé dans ce film, notamment dans la scène où elle chante comme Whitney Houston. Toute la gêne et la frustration du personnage sont évacuées de manière tragico-comique (mais ce n’est pas la seule scène édifiante). Malgré quelques longueurs, nous vous conseillons de voir TONI ERDMANN, un film très revigorant !

AMOUR FOU Disponible sur ARTE jusqu’au 2 septembre 2024.

De quoi ça parle ?

Berlin, au début du XIXe siècle, à l’apogée du Romantisme Allemand. Un jeune poète mélancolique, Heinrich, envisage de mettre fin à ses jours et recherche une femme qui, en se joignant à son macabre projet, lui prouvera son amour. Il propose d’abord à sa cousine Marie (Sandra Hüller) qui n’a aucune envie de disparaître avec lui. Autant Heinrich est plein de pulsion de mort, autant elle respire l’envie de vivre. Heinrich choisit donc une autre femme pour conclure son pacte, tout en espérant que Marie change d’avis.

Sandra Huller n’a pas le rôle principal dans ce film, tourné en plans fixes, avec des images d’une rare beauté. Mais son personnage, solaire, irradie de bienveillance et d’optimisme et constitue une respiration dans ce cadre étouffant de la société du début du 19e siècle. La sensation d’étouffement étant renforcée par l’esthétique du film, magnifique œuvre d’art dont chaque plan fait penser à un tableau.

REQUIEM Disponible jusqu’au 2 septembre 2024

Dans une communauté religieuse très pratiquante, en Bavière, dans les années 1970 , la jeune Michaela, 21 ans, souffre d’épilepsie. Elle réussit à convaincre sa famille de la laisser autonome pour devenir institutrice et quitte sa famille pour étudier à l’université. Là, elle découvre la liberté, l’amitié et l’amour, mais ses crises d’épilepsie sont de plus en plus violentes. Croyant entendre des voix, elle consulte un prêtre. Il la persuade de subir un exorcisme…Cette histoire est inspirée d’une histoire vraie, celle d’Anneliese Michel qui mourut d’épuisement après 67 exorcismes…alors qu’elle soufrait peut-être simplement de problèmes psychiatriques.

Le problème de la santé mentale est d’ailleurs l’angle privilégié par le réalisateur. Sandra Huller tenait là son premier rôle au cinéma et déjà son talent et la force de son jeu lui permirent de décrocher l’Ours d’Argent à la Berlinale. Sa prestation est juste époustouflante.

UNE VALSE DANS LES ALLEES Disponible jusqu’au 2 septembre 2024

De quoi ça parle ?

En Allemagne de l’Est, Christian, jeune homme taiseux et solitaire, dont les multiples tatouages trahissent le passé chaotique, est embauché au rayon boissons d’un supermarché. Il sympathise avec son collègue, Bruno, et tombe amoureux de l’énigmatique Marion qui fait de la manutention au rayon confiseries et qui est souvent absente car victime de son mari…Amour impossible ? Un drame romantique avec pour arène un supermarché, des horaires de nuit et des chariots élévateurs.

Dans ce film, nous avons apprécié le jeu très sobre de Sandra Huller. Beaucoup d’émotions passent au travers des regards, des postures du corps, jamais un supermarché n’a semblé aussi intéressant ! Entre embrouilles internes et secrets personnels, on suit avec intérêt cette intrigue qui nous rappelle que l’amour peut surgir n’importe où et n’importe quand.

DE REQUIEM A ANATOMIE D’UNE CHUTE EN PASSANT PAR LA ZONE D’INTERET

Pour parler de Sandra Huller, nous pensons que le mieux est de la laisser présenter elle-même son parcours. Elle l’a fait à de multiples reprises, nous avons sélectionné deux vidéos récentes.

L’actrice revient sur son parcours à l’International Film Festival de Rotterdam (en anglais) :

Voici également une vidéo récente sur le plateau d’un talk-show américain où elle revient sur son parcours (en anglais) :

Actuellement, Sandra Huller est à l’affiche du film La Zone d’intérêt de Jonathan Glazer dont voici la bande-annonce.

Il s’agit d’un film important, notamment pour le devoir de mémoire, et son rôle n’est pas facile : elle y interprète le rôle d’Hedwig Höss, épouse d’un officier nazi. Pour ce rôle elle a été nominée pour les BAFTA 2024 dans la catégorie Meilleure Actrice. Dans la même compétition, le film a obtenu le prix du Meilleur Film Britannique.

En espérant vous avoir envie donné envie de découvrir cette fabuleuse actrice et les films cités, bon visionnage !

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